KATUTURA


mardi, octobre 14, 2008
 


Essai de réflexion sur la « litanie des saints » suite à une canonisation

Les noms chrétiens et les autres ?

En Afrique du Sud, l’enseignement du catéchisme avait sa place quotidienne dans l’ordre du jour scolaire,
de 8h00 à8h45 ! Presque tous les élèves portaient des noms « chrétiens européens » ce qui était un avantage pour trouver une place dans une école catholique bondée à l’époque. Mais il y avait aussi des Moïse, Aaron, Jeremiah, Salomé et Rebbeca ! Des noms d’origine tribale africaine : aucun ! Aujourd’hui, presque tous ces noms chrétiens ont heureusement basculé dans le rythme onduleux, joyeux ou triste, des tambours locaux, ainsi Ma-di-ba, Mand-len-xhosi, Phum-zi-le, Ja-bu-la-ni, , San-di-le, Si-pho , Kho-tso… Ils, elles, sont dûment baptisés et membres d’une Eglises chrétienne…De même pour nous, les Sœurs, notre nom de baptême, comme on dit, était remplacé par un nom que les supérieures choissisaient d’une liste de trois, que nous leur donnions. Mon nom était Anne, on m’a attribué « Claire-Marie ». Après Vatican II, Rome décréta que les Sœurs pouvaient, si elles le souhaitaient, reprendre leur nom de baptême qui était aussi celui inscrit dans le passeport. Si je n’ai pas changé, c’est parce que tous mes élèves étaient habitués à Claire-Marie qu’ils prononçaient allègrement "Claine-Malie" car en Lozi les « r » n’existent pas.

Canonisation

Dimanche dernier, 12 octobre, Maria Bernarda Bütler, née Verena Bütler fut l’une des cinq personnes canonisées à Rome. Maria Bernarda Bütler est maintenant inscrite dans le calendrier des saints et la célébration de sa mémoire est fixée au 19 juin.

Mais elle n’est pas encore dans la litanie des Saints qu’on invoque dans l’Eglise catholique.
De plus avec grand respect, le présentateur de notre TV romande a fait un couac en affirmant gaiement que les fidèles pouvaient adorer dorénavant Maria Bernarda Bütler. Peut-être pensait-il « mon amour je t’adore » qu’on murmure à l’oreille d’un être cher…

Albert Longchamp SJ explique brièvement comment on en arrive à ce Grand «show» liturgique à l’adresse suivante :
www.swissinfo.ch/ (du 12 et 13 octobre 2008)

Un saint, c’est quoi, c’est qui ?

Des personnes fascinées par Jésus de Nazareth, ce « paysan juif » (A.N.) si « parfaitement humain qu’Il est Dieu », Fils de l’homme et fils de Dieu, selon Edwards Schillebeeckx OP. Ces personnes, et elles sont nombreuses qui essaient d’écouter Jésus et, avec son amour, essaient de proclamer que l’injustice n’aura pas le dernier mot et agissent selon cette conviction. Durant les premiers siècles de l’ère chrétienne, les petits et les pauvres (et Jésus s’identifie à eux) portaient ces bienfaiteurs - souvent des gens de leur milieu - dans leur cœur et dans leur mémoire, comme nous le faisons aujourd’hui avec les humains, nos frères et sœurs envolés et que nous aimons ! C’était simplement des saints par la « Vox populi » ! « Vous êtes les meilleurs ! »

Mais dès 1234 cela se complique. La canonisation est dès lors réservée au Pape. « Pour qu'un fidèle défunt soit déclaré saint, le Pape fait instruire un véritable procès sur sa vie, ses vertus et les miracles qu'il a accomplis de son vivant et après sa mort ». La spontanéité populaire, c’est fini, à moins que, comme feu Jean-Paul II, le cri « santo subito » retentisse, dûment amplifié par les médias sur place au bon moment. Encore que… même le « subito » prendra du temps, semble-t-il. C’est que, avant d’être saint, il faut être promu « vénérable » puis « bienheureux ». C’est coûteux, c’est long, parce que, « en plus du postulateur qui tente de montrer que le bienheureux est digne d'être canonisé, le promoteur de justice, surnommé Avocat du diable, (s’il vous plaît), tente de prouver le contraire. Au terme de ce procès, les cardinaux et les évêques constituant la Congrégation rendent leur verdict suite à un vote ».

Un malaise reste présent : l’Eglise institution semble réticente, nous semble-t-il, à honorer des personnes comme :
* Oscar Romero : « Si je suis tué, disait-il, je surgirai dans le peuple du Salvador » . Il fut assassiné par des militaires en disant la Messe.
* Helder Camara : « "Si je donne de la nourriture aux pauvres, on me traite de saint. Si je demande pourquoi les pauvres n’ont pas de nourriture, on me traite de communiste."
* Hector Pieterson : killed in South Africa
* Sœur Dorothy Stang, assassinée dans l’Amazone brésilienne, au service des gens sans terre. Elle était sur la liste des gens gênants !
Quatre Sœurs américaines tuées par les militaires en 1980 au El Salvador ! Silence ecclésiastique, semble-t-i,l au sujet de ces chrétiens dans les sous-sols de la société !
Dag Hammersjoeld
Albert Luthuli…

Je pourrais nommer des gens qui, comme Jésus ont lutté et donné leur force et leur vie pour un monde meilleur ! Dans l’anonymat le plus complet ! Les François d’Assise actuels !
Des gens qui, comme Jésus, n’aidaient pas seulement les gens à mourir, ou à espérer un monde dans l’au-delà, mais à se mettre debout pour avancer face aux systèmes d’exploitation et de domination et faire respecter leur dignité d’humains !

Je respecte ces gestes de Rome qui continue une tradition en canonisant. Mais je pose la question : ces canonisations, elles sont dans l’intérêt de qui ou de quoi ?

Qu’en pense Jésus aujourd’hui ?

Saint Marc rapporte ces paroles de Jésus : « Pourquoi m'appelles-tu bon ? Nul n'est bon que Dieu seul » (Mc 10 :18).